Le Même et Le Différent.
Le Même et Le Différent ont des termes
finalement permutables et indistincts par croisement ; ils sont donc
indifférents l’un à l’autre.
On croit spontanément le Même différent
et opposé du Différent alors qu’en fait, le Différent est le même strictement
identique du Même.
Prenons comme un exemple type deux
philosophes canonisés de très longue date, deux monuments historiques en somme,
officiellement classés très différemment par leurs doctrines respectives en apparence très éloignées l’une de l’autre, philosophes
auxquels on attribue précisément et séparément la paternité de ces doctrines,
et dont les commentaires d’experts très avisés se nourrissent de comparatifs
très oppositifs et différenciés.
Une première fois déjà, l’un comme
l’autre ont été revisités ; on se rend compte un jour qu’ils utilisent
respectivement dans leur œuvre des modalités très différentes d’approche, de
construction de leur thèse et des jargons aux inflexions très dissemblables,
pour finalement parvenir à des conclusions sur les choses et des convictions
très voisines, voire identiques lorsqu’on pousse le raisonnement dans ses plus
ultimes des ultimes retranchements, ou si l’on préfère, lorsqu’on se place à un
ultime niveau scrutateur ; conclusions très voisines donc, mais la plupart
du temps passées inaperçues comme telles une première fois, ou même plusieurs
fois, car masquées derrière de fortes contradictions apparentes, ceci à cause
de la technicité appuyée des discours respectifs de ces deux philosophes,
technicité qui lorsqu’elle est poussée à l’extrême, surévalue et surdétermine à
son propre insu et par les termes et les concepts dont elle use, le contenu
sémantique des dits termes chargés de produire le discernement et « l’écart à l’autre » dont elle se pare. Il y a donc ici une
illusion de prisme.
La place particulière, comme précurseur
et symbole d’un courant d’idée, respectivement attribuée à chacun de ces deux
philosophes dans la chronologie de l’Histoire De La Discipline, n’est donc pas
justifiée car elle s’est faite sur des considérations ou des présupposés
erronés lorsqu’on y regarde de très très très près.
Par ailleurs, il n’est pas
contestable - les témoignages
historiques de ce point de vue là sont innombrables - que d’autres personnes dont on n’a pas
forcément voulu retenir le nom pas suffisamment visible, avant l’arrivée sur
scène de ces deux philosophes, ou qui n’ont pas obligatoirement retenu
l’attention au bon moment, c’est-à-dire purement opportunément, ont, à la modalité près, pensé à peu près les
mêmes choses antérieurement, même si c’est de façon certainement moins élaborée
ou moins volumique. Or, comme pour conforter une maxime populaire voisine
disant : « Pourquoi faire compliqué quand on peut faire
simple ? », l’adhésion individuelle et collective à un point de vue,
n’est pas directement proportionnelle à son degré de sophistication ou à la
complexité de son échafaudage, mais à l’efficacité supposée de sa mise en
œuvre. L’exemple type est celui de la théorie économique la plus solidement
construite et maintes fois citée par nos média au présent et qui, pour autant,
ne convainc pas les citoyens français qu’elle doive s’appliquer pour permettre
à la fois de faire substantiellement baisser le chômage et augmenter la
compétitivité des entreprises.
Ceci nous conduit à penser que trop de
contorsions savantes et dialectiques sur un sujet donné peut parfois aussi
conduire à l’effondrement de l’Idée. En somme, trop d’idées tue les idées ;
trop d’idées aboutit à leur propre implosion et donc à un mouvement de surplace
ininterrompu sur le fil de l’infini…
Comme pour les soi-disant inventeurs de
telle ou telle ou telle autre machine concrètement matérielle, donc, le courant
de pensée que l’on attribue spontanément à tel ou tel philosophe en en faisant
le précurseur avéré, en l’entourant d’une auréole de commentaires élogieux, est
une attitude collective abusive, de préfabrication arbitraire, car ledit
philosophe n’est pas parti de rien - le
rien total est un non-sens absolu en soi, sauf à le considérer comme
l’expression ultime et la résultante de la totalité des choses réunies incluant
l’échelle cosmique ; le vide intersidéral n’est lui-même pas, un Rien Du Tout -.
Ce philosophe n’est donc pas parti de
rien pour élaborer sa doctrine ; celle-ci s’inscrit fatalement dans un
continuum d’idées antérieures placées sur la chaîne humaine depuis les
origines, des idées regroupées par niches, préexistantes et prépositionnées par
leur caractère de « noyaux en gestation purement évolutifs » et déjà
par nature portées par un élan de type tendanciel, en état de construction
continue, participant donc, de fait, à l’élaboration d’une « doctrine non
constituée », puis une fois
décidée, pour devenir ce qu’on veut bien appeler les frontières d’une doctrine lambda
constituée.
Ainsi, les frontières d’une doctrine,
autant que la date de sa naissance elle-même, sont purement conventionnelles,
artificiellement concoctées. La doctrine n’est en réalité qu’une modulation placée sur
la courbe des modulations et des inflexions infinies d’une Même Idée Reconnue
être de nature philosophique…
L’incertitude de ce qui fait, génère,
décide à un Moment Donné de la constitution d’une Classe d’Objets Donnés, d’une
Catégorie Donnée, d’une sous-catégorie aussi, placée face à son vis-à-vis et
alter ego de tessiture un peu différente, par l’esprit comparatif, engendre la
dilution de la question « du Même et du Différent », puisque, ce qui
est à l’œuvre, c’est le rabotage jusqu’à l’annulation, de l’écart entre ces deux
termes comparés.
En outre et toujours dans la même idée
que le Différent se duplique pour se fondre vers le Même, nous avons pu faire
l’expérience, sur nous-mêmes qu’il existe primordialement, naturellement et de
façon innée chez certains groupes de personnes dites profanes envers la
discipline philosophique, des inflexions, des orientations, des attirances ou
des répulsions spécifiques des prédispositions venant de la pensée, des modes
de fonctionnement animés par une certaine forme de la conscience, ce que nous désignerons
aussi un peu curieusement en la personnifiant, comme étant certains états
d’esprit sous-jacents de la Pensée elle-même.
Comme une constante, ces attributs d’une
pensée, pour commencer presque vulgaire, puis un peu plus tard, forgée de façon
empirique, se retrouvent, s’emboîtent et convergent étonnement, se renforçant
au gré des lectures occasionnelles, voire disparates, de certains auteurs
virtuoses, d’érudits en philosophie situés dans certains courants de pensée
déjà constitués…
Il y a donc, indubitablement, de façon
nettement plus répandue qu’on ne le croit, une prédisposition offensive et
localisée en des croyances sectorielles ou catégorielles mais oppositives entre
elles, de type philosophique, et qui vont à l’encontre de la prétendue rareté
des découvreurs, tous domaines confondus.
Grâce à l’infinie plasticité de l’esprit
humain qu’aucun ordinateur n’égalera jamais, des personnes accèdent seules, par
des voies contournées, aux mêmes conclusions sur les choses, que les héros, les
phénix, les auteurs intronisés et présumés de tel ou tel autre corpus d’idées.
Guy
Paradoxe
Rédigé en 2012
Rédigé en 2012
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